You are currently viewing #3 Make business great again : Veja
Source : Veja

#3 Make business great again : Veja

Bien plus que le symbole par excellence du bobo parisien, du jeune cadre dynamique bossant en start-up, la marque Veja est avant tout une des premières marques de baskets éthiques françaises. Laisse-moi te raconter leur histoire, leur modèle de production, leur stratégie de communication…

Genèse d’une marque

Au début des années 2000, les deux créateurs de Veja, François-Ghislain Morillion (HEC) et Sébastien Kopp (Dauphine) travaillaient au sein de prestigieuses banques d’affaires américaines. Aussi cliché que cela puisse paraître, ils ressentent alors une profonde déconnexion avec la réalité. Deux ans plus tard, ils démarrent un tour du monde pour proposer aux entreprises des audits sur leurs projets en matière de développement durable. C’est ainsi qu’ils passent au crible la filière bio en Chine, les panneaux solaires en Afrique du Sud, l’éducation dans les bidonvilles de Mexico… Après un an et demi à voyager, ils en arrivent au constat accablant : « 70% des projets se résumaient à une simple opération de communication, du greenwashing ».

Tous deux passionnés de baskets, ils décident de créer leur propre marque de baskets éthiques pour contrer ce triste constat. C’est ainsi que naît Veja (« regarde » en portugais). 18 ans plus tard, Veja emploie 120 personnes, réalise un chiffre d’affaires d’environ 33 millions d’euros (2018), faisant ainsi la démonstration qu’il est possible de concilier rentabilité financière et responsabilité sociale et environnementale.

« On a choisi de créer des baskets, parce que c’est un produit symbolique de notre génération et de notre époque. C’est aussi un produit qui cristallise les enjeux de la mondialisation par sa production, sa diffusion et son usage. »

Processus de fabrication

Nous nous limiterons ici au processus de production/fabrication/transformation des deux principaux matériaux utilisés par la marque : le coton et le caoutchouc. C’est à Vale dos Sinos, région du sud-est brésilien, que sont fabriquées les baskets Veja. Il faut savoir que le coût de production pour la marque est environ deux à cinq fois plus coûteux (selon les modèles) que celui de leurs concurrents. Cela s’explique par la volonté de la marque de respecter certains engagements écologiques et sociaux.

Coton bio

Depuis sa création, les fondateurs de la marque ont toujours mis un point d’honneur à se procurer du coton selon les principes du commerce équitable. Ainsi depuis 2004, c’est plus de 390 tonnes de coton biologique et équitable qui ont été achetées directement auprès des producteurs et coopératives dans plusieurs régions du Brésil et sur la côte péruvienne. Le prix du coton biologique est fixé en avance en accord avec les associations de producteurs brésiliens et péruviens, le prix est totalement décorrélé du marché et de ses fluctuations garantissant ainsi au producteur un prix d’achat juste.

Aujourd’hui, la marque dispose des labels GOTS (Global Organic Textile Standard) et Fair Trade, garantissant respectivement des processus de production et de transformation du coton respectueux de l’environnement et la garantie d’un prix juste d’achat pour les petits producteurs sud-américains. Pour pouvoir respecter tous ces engagements, la marque achète son coton à un prix deux fois plus élevé que celui du marché.

Caoutchouc

C’est aussi en Amérique du Sud que la marque se procure son caoutchouc, matière indispensable à la fabrication des semelles de tous ses modèles, puisqu’elles sont composées à 20 à 30% de caoutchouc naturel. Depuis 2004, c’est plus de 380 tonnes qui ont été achetées auprès de 620 familles. Le prix final payé par kilo de caoutchouc est 220% supérieur à celui du marché. Tout comme le coton, le caoutchouc est acheté directement à des coopératives, formées par plusieurs familles de récolteurs de caoutchouc d’Amazonie, qu’on appelle aussi les seringueiros. Ces derniers parcourent les étendues de forêts dont ils ont les droits et saignent les arbres (les hévéas) afin d’en récolter le caoutchouc. Ce procédé permet aux arbres de se régénérer et de récolter en moyenne 20L de caoutchouc par récolte.

Modèle économique

Comme nous venons de le voir, le coût de production est vraiment ce qui revient le plus cher. Afin de pouvoir être rentable avec un tel coût de production, ses fondateurs ont fait le choix « 0 pub, 0 stock », ce qui signifie que la majorité du chiffre d’affaires de la marque est directement réalloué à la production et à l’achat de matières premières. Veja fait le pari de la discrétion, de la qualité, puisque c’est seulement une vingtaine de modèles qui ont été designés depuis la création de la marque. Discrètes et intemporelles, leurs baskets sont faites pour durer et il n’y a pas d’incitation à l’achat.

 « Dans les années 1970, Nike devait consacrer 90% du prix de la basket à sa production et 10% à son marketing. Aujourd’hui, c’est l’inverse. On s’est dit qu’en faisant l’économie de la communication, on pouvait produire plus cher sans changer le prix de vente. »

Valeurs

«  Etre rentable avec des valeurs environnementales et humaines, voilà notre devise » (Morillion)

  • Transparence

En ce qui concerne toutes les autres matières utilisées pour la fabrication des baskets, là aussi, un soin particulier est apporté pour savoir d’où proviennent toutes les matières premières, comment elles sont transformées… La transparence est une des valeurs clés pour la marque. Par exemple, il est possible de consulter les contrats signés entre les producteurs de caoutchouc ou de coton. Autre exemple, on retrouve un onglet « Limites » sur leur site, expliquant pourquoi leur processus de fabrication est encore faillible et perfectible, faisant ainsi preuve d’une incessante remise en question et volonté d’amélioration. Pour illustrer cela, on pourrait aussi parler de la certification B Corp : c’est une certification qui évalue l’impact global de Veja, via un questionnaire d’environ 300 questions traitant de nombreux sujets (salaires, fournisseurs, environnement, gouvernance…).

  • Engagement

Veja est aussi engagée socialement. Ainsi toutes les paires de l’e-shop et des magasins passent par les mains des employés d’Atelier Sans Frontières, luttant pour l’insertion professionnelle des personnes en situation d’exclusion. On peut aussi parler du fait que les banques avec qui la marque travaille n’ont aucune filiale dans des paradis fiscaux.

  • Innovation

Afin de réduire encore plus leur impact environnemental, Veja s’intéresse aussi à l’upcycling (=Le surcyclage est l’action de récupérer des matériaux ou des produits dont on n’a plus l’usage afin de les transformer en matériaux ou produits de qualité ou d’utilité supérieure. Il s’agit donc d’un recyclage “par le haut”) en transformant bouteilles en plastique ou chutes de tissus en futures baskets.

Enfin, je terminerai en vous parlant du nouveau concept-store Veja x Darwin qui a ouvert ses portes le 30 juin à Bordeaux. C’est un lieu destiné à la réparation et au recyclage des baskets, où sont également présentés des prototypes ou encore des baskets d’anciennes collections. On y trouve un atelier de cordonnerie pour faire réparer ou même juste nettoyer sa paire de baskets un peu usée.

Sources

 

Laisser un commentaire