La politique de préservation des sites exceptionnels en France a été instituée par la loi en 1906 et a pris sa forme définitive en 1930. Elle vise les sites qui méritent une protection nationale car leur conservation présente un intérêt général du point de vue artistique, historique, scientifique ou pittoresque. Le classement des sites s’est étendu à des espaces de plus en plus vastes (ensembles géologiques, géographiques, paysagers). Ces sites sont un facteur de développement local, une source d’attractivité et une fierté pour les habitants.
En France, 4% du territoire est touché par les décrets de cette loi, cela représente 2700 sites classés et 4000 sites inscrits. Il y a en effet deux niveaux de protection : l’inscription qui joue un rôle de reconnaissance et le classement qui permet de mettre en place des actions plus concrètes.
Ces actions sont dirigées par les commissions départementales, supervisées par la Commission supérieure des sites. Leur mission s’appuie sur l’élaboration d’une politique de conservation et de valorisation des monuments naturels (paysages, sites urbains ou ruraux). Il s’agit d’un défi sur le long terme car il faut concilier la conservation des sites et la préservation de leur caractère vivant, accueillant.
La mise en place de politiques de préservation des sites exceptionnels se heurte à des difficultés de différents ordres. D’une part, les flux touristiques à destination des espaces naturels préservés ne cessent d’augmenter, représentant à la fois une menace et une opportunité pour ces sites. Ils doivent donc être encadrés pour allier développement économique local et préservation des espaces protégés. D’autre part, les politiques de préservation des espaces naturels protégés mobilisent une grande variété d’acteurs aux intérêts parfois différents : acteurs institutionnels, élus, associations de protection de la nature, population locale et visiteurs, mais aussi scientifiques. Ce sont donc des espaces susceptibles de cristalliser une forte tension.
Ainsi, les espaces naturels protégés font face aujourd’hui à différents défis : améliorer l’efficacité de la gestion des aires protégées, favoriser l’implication des acteurs locaux et des visiteurs, développer un tourisme durable et responsable, le tout sans renoncer à l’authenticité de ces sites. L’adhésion et l’acceptation de ces dispositifs par les publics constituent alors un enjeu majeur pour l’efficacité des politiques de préservation des sites exceptionnels.
Comment concilier préservation et valorisation des espaces naturels protégés par l’ouverture de ces sites au plus grand nombre ?
Pour essayer de comprendre les limites de la politique de protection des sites exceptionnels en France, il nous faut prendre un exemple. Nous nous sommes penchés sur le cas du plan de préservation du Cirque de Navacelles, situé à la frontière entre l’Hérault et le Gard. Depuis 2017 cet endroit est classé Grand Site de France, et si le lieu compte moins de 25 habitants, il accueille près de 250 000 visiteurs à l’année, majoritairement en période estivale.
Le but de la candidature aux Grands sites de France consiste à impulser une “dynamique de territoire, contribuer au rayonnement des politiques […] de développement durable de la France, et enfin transmettre l’espace aux générations futures dans les meilleures
conditions possibles.”
Concrètement, il s’agit entre autres de changer l’emplacement des parkings, d’augmenter la taille des espaces de pique-nique, de détruire un sanitaire public, de construire un espace de promenade dans le village et des murets dans le style de ceux historiquement existants, et de mettre en place un système de navettes pour éviter une trop forte affluence de voitures dans l’espace protégé… La faible pollution du site en fait un espace d’observation des étoiles parfait, mais cela est compromis depuis l’installation de lampes sur les murets, responsables d’une importante pollution lumineuse.
Ainsi, nombre de ces décisions sont révélatrices d’un problème latent de concordance entre la labellisation des espaces protégés et les actions réelles menées par la suite. Certes, il faut bien entendre que l’engagement de tant d’acteurs à différents niveaux et différentes échelles territoriales, pour protéger et accorder un statut spécial à un espace comme celui du Cirque de Navacelles, implique des intérêts possiblement contradictoires pour chacun d’eux, mais il ne faut pas oublier ce qui est primordial dans la démarche.
Dès lors, s’il est nécessaire que chaque parti prenant soit entendu et récompensé, les exigences touristiques et économiques ne peuvent résolument primer sur les préoccupations locales et environnementales. Pour que ces premiers engagements soient réellement tenus, rien n’est aussi efficace que des sanctions concrètes, comme par exemple l’interdiction formelle de se garer le long du parcours ailleurs que dans le nouveau parking prévu à cet effet. Cela peut paraître très trivial, mais les locaux déplorent le fait que ce n’est que rarement respecté, par manque de réelle désincitation.
De plus, il est certain que le dialogue avec la population locale n’est pas assez exploité, alors même qu’elle connaît mieux que quiconque l’espace en question, et que la nécessité de consultation est inscrite dans le Schéma d’orientation pour l’aménagement et la valorisation du hameau de Navacelles. Dans le cas particulier des murets éclairés récemment intégrés au Cirque de Navacelles, aberration énergétique qui plus est, l’aval des locaux n’avait pas du tout été obtenu, sûrement car leur nombre et leur poids économique n’est rien face aux centaines de milliers de touristes annuels.
Le cas du Cirque de Navacelles est bien loin d’être un cas isolé, et les solutions proposées sont parfaitement généralisables. Consulter la population locale, favoriser la préservation de la biodiversité au détriment des revenus touristiques et ne pas transiger quant aux infractions et détériorations des territoires paraissent être des banalités, mais ces recommandations sont pourtant très peu respectées en pratique. La classification des espaces n’a jamais été aussi importante, et si chacun d’eux est réellement protégé et défendu comme promis, les bénéfices environnementaux, culturels et touristiques sauront se montrer à la hauteur.
Toujours est-il que le sujet des espaces protégés est bien plus vaste. On peut notamment mentionner les espaces maritimes, qui sont d’autant plus problématiques car il est difficile de les surveiller au quotidien et d’observer à l’œil nu les dégâts infligés (pollution sous-marine, destruction des fonds marins).
Recherches menées et texte rédigé par Buresi Etienne, Crouzet Théo, Lacrépinière Sambre et Teknetzian Helena afin de
répondre à l’ODD15 (vie terrestre)
Sources :
https://uicn.fr/wp-content/uploads/2014/07/Espaces_naturels_proteges-OK.pdf
https://www.ecologie.gouv.fr/politique-des-sites
https://www.grandsitedefrance.com/actus/622-nos-paysages-exceptionnels-en-peril
https://www.vie-publique.fr/eclairage/273873-la-protection-du-patrimoine-monumental-francais-un-etat-des-lieux
https://www.cirquenavacelles.com/candidaturelabelgrandsitedefrance/